Il aurait dû rester chez lui. Assis dans un coin, dans un cercle de gens dont il ne connaît même pas le nom et qui s’esclaffent pour un rien, il regrette amèrement d’avoir répondu à la positive à la proposition d’un ami sur le fait de se rendre à cette fête. Mais il se sentait seul. A ce moment là, il avait pensé qu’être au milieu des gens, aussi éloignés de lui soient-ils, lui permettraient de se débarrasser de ce foutu sentiment. Il se rend compte maintenant d’à quel point il a eu tort. Il pourrait pourtant se lever, décider de couper court à cette torture pour revenir se terrer dans son trou à rat, mais quelque chose l’y retient. Peut-être que l’illusion est assez douce pour s’y accrocher, même si elle ne remplit à peine le fond de son vide effarant. Il ferme à demi les yeux, écoute à peine la conversations, laisse les paroles caresser ses tympans sans les laisser remonter à son cerveau. Lorsqu’il ne fait pas attention, il revoit son visage, il sent ses lèvres contre les siennes, et alors il doit se pincer la cuisse pour arrêter de divaguer. Elle doit le haïr à présent. Même si il n’est pas sûr que Max soit capable d’une telle émotion. Quel idiot. Il suffit qu’une chose se passe bien dans sa vie pour que quelque chose en lui le pousse à la gâcher. Il s’en veut. Terriblement. Et puis elle lui manque, même s’il ne se l’avoue pas. Son petit rayon de soleil. Il sait qu’elle lui a envoyé des messages mais il ne les a même pas lu, trop effrayé par ce qui pourrait être leur contenu. Son coeur lui fait mal. Il ne devrait pas. Si seulement il pouvait être insensible. être à l’intérieur comme ce qu’il se force à montrer à tous.

Lorsqu’il se redresse un peu, ses yeux s’arrêtent sur une jeune fille, au loin, qui est de dos. On dirait elle. Mais ses yeux lui font défaut ces derniers temps, il lui semble la voir à tous les coins de rue, avant qu’il ne s’aperçoive que ce n’est que son esprit qui lui joue des tours. Elle n’est pas là. Pourquoi serait-elle là ? Mais comme l’inconnue ne peut pas le voir la fixer, il en profite pour laisser ses yeux se reposer dans la courbe de sa taille, sur ses mèches qui dégringolent, sur sa tête qui bouge au rythme de la conversation qu’elle semble avoir. Pathétique. Je suis pathétique, pense-t-il.

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Les jours avaient été longs. Beaucoup trop longs pour la jeune coréenne. Depuis la fameuse soirée où tout lui avait échappé, elle n’avait plus eu de nouvelle de sa part. Rien, malgré ses messages et ses appels. Junho n’avait pas donné un seul signe de vie. Comme si… leur lien s’était soudainement effacé pour lui. Pourtant pour elle, c’était tout le contraire. Max se souvenait encore de ce baiser volé, si soudainement. Ce dernier l’avait énormément perturbé. Quoi de plus normal au fond, lorsqu’on se faisait embrassé pour la toute première fois. Elle n’aurait jamais vu croire le plus vieux capable de faire une chose pareille. Rien ne l’avait mis en alerte. Junho avait été… tout simplement gentil avec elle. Pourquoi ? Pourquoi l’embrasser et partir si abruptement ensuite ? Pourquoi ce silence soudain ? Avait-elle fait quelque chose de mal ? Etait-il en colère contre elle pour une raison qu’elle ignorait ? Pendant des jours et des jours, la petite douceur tenta de trouver son erreur. Elle se tortura l’esprit et le cœur en vain, sans jamais trouver de réponse.

Ce baiser... Elle y repensait sans arrêt. Même après deux semaines, la sensation des lèvres de son ainé collées aux siennes demeurait encore. Malgré une terrible gêne qui faisait toujours autant rosir ses belles joues rondes, la belle n’avait qu’être étrangement envoutée par ce geste. Personne ne l’avait jamais embrassé avant lui. Et même si rien n’aurait pu laisser prévoir une telle tournure entre eux, Max n’arrivait pas à en vouloir à Junho. D’une façon ou d’une autre, cette action avait fait de lui une personne encore plus spéciale pour elle. Et son cœur, pauvre petit muscle perdu, ne pouvait s’empêcher de battre toujours plus fort chaque fois qu’elle se remémorait la scène, encore et encore. Avec peur… et joie également. Elle ne s’en rendait peut être pas compte, mais des sentiments à l’égard de son ainé étaient en train de naître dans son cœur. Sauf qu’elle était triste, la petite Maxou. Terriblement triste. Parce que ce garçon pour qui elle ressentait toutes ces choses étranges ne lui avait plus parlé. Au bout d’une semaine de silence, elle était allée le voir à la boutique. Elle n’avait pas eu le courage de rentrer à l’intérieur. Paniquée et chagrinée au possible, la douce était bêtement restée planter sur le trottoir d’en face… les larmes aux yeux malgré elle. Puis, elle s’était finalement résignée à partir en courant. Réaction stupide. Certainement qu’elle avait eu peur de le déranger. Peur d’être de trop. Pourtant, il lui manquait Junho… Il lui manquait même terriblement.

Ce fut sans trop de conviction qu’elle accepta de suivre des copines de sa promo ayant remarqué sa mine toute chagrinée depuis un moment. Rien que pour les remercier de leur attention, Max avait bien voulu les accompagner à cette fête. Oui, elle devait se changer les idées. Essayer de penser à autre chose… Et le fait de recevoir un accueil aussi chaleureux de l’hôte en arrivant à la soirée lui fit malgré tout chaud au cœur. Il y avait beaucoup de monde à cette fête, beaucoup de monde qu’elle ne connaissait pas. Tout en parlant agréablement avec ses amies et quelques personnes qu’elle rencontrait pour la première fois, la petite coréenne s’efforça à songer à autre chose qu’au visage tendre de Junho si près du sien. Mais c’était difficile… « Max ? » La voix d’une de ses camarades la fit revenir brutalement à la réalité. Encore une fois… elle s’était perdue dans ses pensées. Encore une fois… elle était revenue à ce moment. S’excusant adorablement pour être aussi ailleurs, elle décida d’aller prendre quelque chose à boire afin de se rafraichir les idées.

Sauf qu’à mi-chemin, tout son être son stoppa lorsque son regard croisa celui d’un garçon ressemblant terriblement à celui hantant ses pensées depuis des jours. Ses grands yeux surpris captèrent soudainement ceux de cet homme et le temps s’arrêta presque rudement. Non… ce n’était pas possible. Elle rêvait, forcément… « Oppa… » Souffla t-elle presque pour elle-même, complètement paralysée.

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Il voit le mouvement s’amorcer, il se retourne. Junho, peu désireux de se faire repérer dans sa contemplation, baisse rapidement le regard avant de le porter vers les personnes qui discutent à côté de lui. On lui pose une question, et, sans savoir de quoi il s’agit, il répond oui vivement et attrape un verre qu’on lui a servi. Il boit rapidement son verre de soju avant d’enfoncer sa main dans sa poche, sentir son portable entre ses doigts. Est-ce qu’il devrait au moins lui dire de ne pas essayer ? Est-ce qu’il devrait s’excuser, une nouvelle fois ? Il finit par se lever de sa chaise “Je crois que je vais y aller…” lance-t-il à la bande, prêt à retourner sous ses couettes et à broyer du noir. Alors qu’il fait un pas hors du cercle, il capte son regard. Max. Il tourne la tête, et revient la regarder. C’est bien elle. Il s’arrête mi pas, et laisse ses bras ballants d’un côté et de l’autre de son corps. Est-ce qu’il peut fuir ? Il lance un regard vers la porte, elle n’est pas si loin. Mais l’idée qu’elle puisse assister à sa tentative de s’éloigner le plus possible d’elle lui pince douloureusement le coeur. Quel idiot. Il n’aurait jamais dû la raccompagner chez elle dès la première fois, lorsqu’elle avait débarqué avec son pervers aux trousses. Dans quelle situation s’est-il mis ? Il se conforte dans le fait que sa vie, bien que malheureuse, reste simple dans les faits. Tout se mélange lorsque la bonté vient faire des siennes, personnifiée dans le bout de femme qu’est Max.

Il finit par relever le regard pour croiser le sien. Il ne peut pas partir, hein ? Mais il n’a rien à lui dire. Il réduit la distance qui les sépare, de quelques pas, mais l’endroit dans lequel ils se trouvent lui tord l’estomac. Les rires, l’odeur de fumée, d’alcool, la musique, il en fait une grimace et regrette de l’avoir rencontrée inopinément dans de telles circonstances. Et encore… Elle aurait pu le voir au bras d’une demoiselle. C’est vrai, la situation aurait pu être pire.

Il prend une inspiration. Quel trouillard. Arrivera-t-il jamais à affronter en face ce qui le terrifie plus que tout ? Arrêtera-t-il de trouver confort dans son trou creusé profondément, là où aucune lumière ne semble se frayer un chemin ? “Max” finit-il par dire, doucement. Il ne peut pas lui dire “désolé, je n’ai pas pu répondre à tes sms, j’étais occupé”. Parce que Junho ne ment pas. Tout entier perdu dans ses pensées, un rire triste lui échappe de la bouche, et il vient poser son regard sur la scène autour d’eux. Il ne peut rien dire dans ces conditions. “Je suis lâche” finit-il par sortir à mi mots, peut-être pas assez fort pour qu’elle ne l’entende. Il se sent coincé.

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C’était lui. Elle n’arrivait pas y croire. Elle avait l’impression de le revoir après une triste et sombre éternité. Sans pouvoir le contrôler, son cœur tambourina violemment dans sa cage thoracique ; à tel point que ses mains durent se poser contre sa poitrine afin de se calmer. D’essayer tout au moins. Car être calme était tout simplement impossible pour Max. Mince quoi, c’était Junho là, juste devant elle… Comment devait-elle se comporter ? Elle était aussi heureuse que perdue, aussi euphorique que profondément désolée. Mais par-dessus tout, elle était triste. Triste de pouvoir le revoir uniquement maintenant alors qu’elle n’avait attendu que ça pendant des jours. Cet instant était si intense qu’elle en avait les jambes aussi tremblantes que des brindilles au vent. Il baissa son regard un instant alors que le sien restait toujours encré sur son visage. Maladroitement, ses petites menottes tirèrent un peu le bas de sa jolie jupe. Comme une enfant maladroite et penaude craignant de se faire gronder.

Il finit par s’avancer légèrement. Elle fit de même. A présent proche l’un de l’autre, le temps sembla véritablement se mettre en suspens. L’impression d’être à mille lieux d’ici, malgré tout ce monde autour d’eux. C’était éprouvant. Pesant. Max avait peur. Peur de mal faire, d’agir de la mauvaise façon. Lorsque Junho murmura son prénom, elle put sentir ses battements redoubler en elle. Sa voix… Elle lui avait presque autant manqué que lui. Ses beaux yeux se mirent à briller malgré elle ; preuve sincère de l’émotion qu’elle pouvait ressentir. Elle ne comprenait pas. Et c’était frustrant. « Pourquoi… ? » Demanda t-elle dans un murmure cassé, tremblant. Le voir aussi mal à l’aise lui faisait du mal. Il avait l’air de vouloir partir et vite. L’air d’être profondément gêné de la retrouver autour de tout ces gens. Et là... il se mit à rire. Mais pas comme d'habitude. Cest un rire amère. Le sang de la plus jeune ne fit qu’un tour en réalisant cela. Sourcils fronçés, la belle s’empressa alors d’attraper la main de Junho pour l’entrainer avec elle, loin de cette ambiance pesante.

Le forçant à la suivre avec une énergie affolée, elle le tira entre les invités de la fête, se fichant bien de passer entre ses copines main dans la main avec un garçon qu’elles connaissaient ni d’Eve ni d’Adam. Dans sa course, ils arrivèrent au détour d’un couloir et ce fut sans réfléchir que Max ouvrit la première porte à sa disposition avant de pousser le plus vieux à l’intérieur. A l’intérieur d’un… placard à balai ? Oh. Bon, on faisait comme on pouvait. Elle tenta de choper la ficelle servant d’interrupteur au dessus de leurs têtes, maladroitement. Et lorsque ce fut fait et qu’ils purent enfin voir le visage de l’un et de l’autre, Max   se sentit faiblir. « Oppa... idiot ! » Gronda-t-elle alors adorablement, tandis que son regard brillait encore plus... sublimement triste. Le souffle court, la poitrine se soulevant de frustration, elle ne put s’empêcher de demander, encore une fois  « Pourquoi ?? Pourquoi Oppa ?! Est-ce que j’ai fais quelque chose de mal ? Si c’est le cas, j’suis vraiment désolée ! J’te demande pardon ! »

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Il se laisse traîner. Il devrait sûrement résister, se retourner. Junho ne doute pas un seul instant que sa force surpasse largement celle de Max, mais il ne trouve pas l’impulsion nécessaire pour la repousser et fuir devant ses yeux à nouveau. Il ne sait même pas où elle l’emmène, et pourquoi. Peut-être pour lui dire à quel point il est affreux de l’avoir abandonné comme ça, de l’avoir ignorée, qu’elle regrette de l’avoir connu et de s’être accroché à lui. Une multitude de scénarios défilent dans son esprit alors que ses pas suivent presque trop sagement ceux de la jeune femme. Ses amis même tournent le regard vers eux, mais le spectacle ne leur est pas si surprenant : si Junho peut rentrer avec une jeune fille, il le fera. L’idée qu’il puissent penser que Max est “une fille parmi tant d’autres avec qui il va coucher” lui donne légèrement la nausée, mais il écarte comme il peut les jugements d’autrui qui l’atteignent bien plus qu’il ne laisse paraître. La jeune femme ouvre une porte, les pousse à l’intérieur. Elle aurait pu choisir une chambre, ça aurait été plus spacieux. Là… C’est… Il ne peut même pas prendre plusieurs pas en arrière pour établir une distance de sécurité. Il n’a guère d’endroit où poser son regard à part dans sa direction.

La lumière qui vint les sortir de l’obscurité lui fit plisser les yeux, un instant. On se croirait dans un mauvais film. D’horreur ou romantique, on verra selon la suite des évènements quel genre sera choisi. Il pose son regard sur le sol, et attend la sentence. Il suffit de lâcher la corde pour que la guillotine siffle. Rapidement la première remontrance arrive, beaucoup trop indulgente. Même son ton ne semble pas indiquer qu’elle lui en veuille particulièrement. Pourquoi est-elle comme ça ? Ne peut-elle pas s’énerver, venir le frapper, l’insulter pour de vrai, lui faire comprendre à quel point il lui a fait mal ? Les mots qui se déversent de ses lèvres ensuite ne viennent qu’ajouter à son malaise. bien sûr qu’elle pense que c’est de sa faute. C’est Max. “Ne t’excuse pas” dit-il rapidement, sans attendre qu’elle puisse reprendre une respiration et continuer avec ça. Il déteste être une personne qui la force à s’excuser alors qu’elle n’a rien fait. Il peut au moins avoir la décence de lui faire comprendre. “Tu n’as rien fait de mal.” ajoute-t-il avec un petit sourire. Dieu. Il n’y a qu’elle pour prendre sur ses épaules tout le malheur du monde. Sa gorge se serre, de voir à quel point elle est rapide à se mettre à genoux, à supplier le pardon. Ce genre de comportement, ça lui donne envie de fuir, ça lui donner envie de cracher, de siffler, d’arrondir le dos comme un chat prêt à attaquer. Mais avec elle il ne le peut pas. Tout reste à l’intérieur, et il sent les remarques acerbes se rencontrer l’une l’autre sans avoir aucune occasion de passer ses lèvres. “C’est moi qui ais fait quelque chose que je n’aurais pas dû. Et j’ai honte.” Il souffle, doucement. “Je te demande pardon. J’ai tout gâché” Il reste flou, ne veut pas dire quelle partie précisément de son comportement n’aurait pas dû se passer, pourquoi exactement il demande pardon, car même dans son esprit cela reste encore un peu trouble. “Pourquoi est-ce que tu fais ça ? Pourquoi est-ce que tu t’excuse pour rien ? Qu’est-ce que tu imagines que j’aurais pu te reprocher ?” lui demande-t-il, en s’attendant à une réponse. Il veut savoir. Comment ça marche, dans sa tête. Comment c’est possible.

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Elle était complètement larguée. Dans un état second et indéchiffrable. En temps normal, Max n’aurait jamais osé entrainer un garçon à sa suite ainsi, avec autant d’assurance et de courage. Mais c’était Junho, bon sangs… Même si le temps qu’ils avaient passé ensemble pouvait sembler infime, les fameuses images indélébiles avaient déjà naquis dans son esprit et dans son cœur, comme un champ de fleurs bien trop joli. D’une façon ou d’une autre, il était entré dans sa vie de façon intense et imprévisible. Observer la neige tomber, la jeune coréenne n’avait pas réussi à le faire ces derniers jours. Elle assimilait chaque flocon blanc à lui, et ça lui faisait de la peine. Cette froideur et ce silence soudain lui faisait du mal. Alors… le simple fait de le revoir enfin la rendait aussi forte que fébrile. Elle ne comprenait pas pourquoi… “Ne t’excuse pas” Il le fallait pourtant, non ? Interdite et perdue, la jolie douceur scrutait le visage de son ainé avec des yeux humides malgré elle ; à la recherche d’une réponse à ses questions. Si elle n’avait rien fait de mal… Alors pourquoi ? Et pourquoi ce sourire si triste…

Il s’excusa à son tour et elle ne put que secouer vivement la tête de droite à gauche pour qu’il arrête. Non, il n’avait pas à avoir honte. Ni à lui demander pardon. Il n’avait rien fait de mal. Cela avait juste été… très surprenant ? Les questions fusèrent comme une pluie d’étoiles filantes dans le ciel. Sa petite bouche pulpeuse entrouverte, Max semblait totalement désarmée. Ce qu’il aurait pu lui reprocher ? « Je… sais pas. » Finit-elle par avouer, comme une enfant ayant peur de se faire gronder mais quand même très sincère. « J’ai vraiment cherché à savoir, je te jure » Elle avait cherché durant des heures entières, des nuits entières mais… «J’sais vraiment pas… » Sa voix sembla brisée en susurrant cela, comme du cristal fragile et bien trop délicat. En sentant les larmes lui monter un peu trop vite aux yeux, la cadette s’empressa de cacher le haut de son minois en posant son bras dessus, laissant simplement apparaître ses lèvres qui se faisaient alors martyriser par ses canines. « …Pardon. » Un sourire triste les étira ensuite, comme si elle comprenait que Junho en avait marre de l’entendre s’excuser mais qu’elle ne pouvait rien y faire. Elle s’en voulait. Parce qu'elle voulait que tout redevienne comme avant, sans savoir comment faire. « Mais... Oppa n’a rien gâché. » Quand bien même ce baiser était surprenant et qu’elle ne le comprenait pas. « T’es le premier garçon ayant bien voulu embrasser une idiote comme moi… Et rien que pour ça… » Pourquoi le cacher ? Elle n’en avait pas honte. « Rien que pour ça…» répéta-t-elle encore, alors que les larmes finissaient par étrangler sa voix et mouiller son beau visage caché. « T’as pas le droit de m’ignorer sans m’expliquer.... Parce que moi, je suis pas fâchée contre toi...! » Juste… complètement perdue. Tout en serrant ses jolies dents toutes blanches avec frustration et incompréhension, Max étouffait ses sanglots tant bien que mal.

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Il la fait pleurer. Et il se rend compte, malgré lui, que les larmes, au lieu de le plonger dans une peine, lui apportent une certaine satisfaction. Pas celle de la faire souffrir, il ne se repaît pas du mal d’autrui, mais en ça il a la confirmation qu’il attendait, d’une certaine manière, depuis un moment : ce n’est que ça qu’il sait faire. Il marche dans les sentiers battus, et est enveloppé à nouveau d’une certitude qui le rassure, rien ne change après tout, il se sait coincé dans une boucle que personne n’essaiera de faire dérailler. Il souffle. Un poids s’est élevé de sa poitrine. De la réalisation qu’il lui suffit d’accepter d’être la personne qu’il s’imagine être pour arrêter de se sentir mal. Une gentille fille n’a rien à faire à s’accrocher à son bras, et il n’a rien à faire à se bercer d’illusions pour penser pouvoir se caler sur son rythme pour avaler sa douceur comme un vampire à la carotide. Il l’oublie presque un instant, tout entier perdu dans les méandres de ses pensées, alors même qu’elle est en train de sangloter devant lui, lui montrer sa peine de la façon la plus vulnérable au monde. Je suis affreux et encore une fois, c’est comme si on lui donnait une bonne étoile. C’est bien. Tu as rempli ton rôle à la perfection. Il la laisse pleurer. Il ne peut rien dire pour assécher ses larmes. Et il sait que si elle décide de s’accrocher encore à lui, ce ne seront pas les dernières à s’échouer jusqu’à sa mâchoire.

“Alors tu es stupide” répond-il finalement. Un froideur s’empare de sa voix. Que peut-il y faire ? à ce moment là, le dégoût monte tout entier en lui de voir Max parée d’une telle faiblesse, de lui afficher sans même faire un effort pour la cacher; Effrayé de la sensibilité, effrayé par ces livres ouverts tous prêts à se faire poignarder le coeur à chaque coin de rue. “Tu devrais être fâchée contre moi. Tu en as tous les droits. Comment est-ce que tu veux survivre si à chaque fois qu’il t’arrive quelque chose de mal, tu ne fais que te blâmer toi même ? Crois moi que le grand sourire que tu affiches maintenant deviendra de plus en plus faiblard.” Il fait un demi pas en arrière, vient reposer son dos contre les étagères. De toute façon, il ne peut guère aller plus loin, ce réduit fait la taille d’une boîte à chaussures. “Tu devrais me crier dessus. M’insulter. Me frapper. Mais tu es… Max” dit-il avec tristesse. Il gèrerait mieux la colère. Il aurait moins envie de la fuir, de la rejeter, de la haïr. La colère vient faire trembler ses doigts. Le répit que ses pleurs et son propre silence lui ont apportés semblent s’évanouir. “j’ai tous les droits de t’ignorer. C’est à toi de faire ce qu’il faut si tu n’es pas d’accord avec la situation. Tu sais à quoi sert la colère ? à poser des limites. A faire comprendre aux autres qu’ils n’ont pas le droit de te piétiner, d’une façon ou d’une autre. C’est une façon pour ton esprit de te dire non, je n’ai pas envie de ça, et tu sembles la rejeter plus que tout. Un humain sans colère n’en est pas un. Personne ne survit en retournant toute douleur contre lui même.” Ne le sait-il pas mieux que personne ? Chaque personne a sa propre façon de gérer. Il peut mépriser autant qu’il veut les faiblesses des autres, il sait au fond que ce n’est que le reflet de la haine qu’il ressent pour les siennes, qui semblent incapables de s’évanouir.

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“Alors tu es stupide” entendre ça lui fit le même effet que celui de se prendre un mur en plein visage. Ce n’était pas la dernière fois qu’on la trouverait stupide… Mais c’était bien la première fois que Junho le lui disait et aussi froidement. Froid, oui. Glacial. Pourquoi ? Elle voulait simplement savoir, elle. Elle ne voulait pas qu’ils se disputent. Affligée par ce qu’il crachait sans la moindre douceur, Max finit par découvrir son minois de son bras ; laissant alors apparaître un visage aussi triste que perdu, aussi humide que blafard. Ses sourcils se froncèrent d’effroi en le voyant reculer d’un pas afin de s’éloigner d’elle. Il l’évitait. Elle le dégoutait, elle et ses larmes. Il semblait exaspéré par l’être qu’elle était dans tout son ensemble. Avoir le droit d’être fâchée contre lui ? Bon sang, mais elle ne le voulait pas ! Quand allait-il le comprendre ? Et elle avait encore moins envie de l’insulter ou de le frapper… “j’ai tous les droits de t’ignorer. ” Non ! Pas comme ça, pas aussi abruptement ! Et encore moins sans lui expliquer ! Pourquoi diable être aussi blessant tout à coup ?  En percevant difficilement le reste de sa phrase, la douceur baissa son visage meurtri afin de ne plus avoir à le regarder dans les yeux. Il lui faisait du mal en disant toute ses choses. Et cela lui faisait d’autant plus mal de l’écouter. Pourtant, la p’tite coréenne comprenait malgré tout que ce discours était plus une leçon de morale qu’autre chose. Sauf que le moment était très mal choisi pour lui demander de se remettre en question.

« Je suis en colère. » Finit-elle alors par lâcher, sans prévenir, les poings tremblants et serrés. Après un silence, son visage se releva pour dévisager gravement Junho à travers les larmes. Ses dents se serrèrent à nouveau, ses yeux brillèrent encore. « C’est ça… ce que tu veux entendre ? » Elle lui posa cette question avec si peu de délicatesse qu’elle-même en fut choquée intérieurement. Mais cela ne se vit pas. « Tu te sens mieux maintenant ?? » Demanda Max en haussant la voix, les épaules tremblantes. « Tu m’as dit que je ne devais surtout pas changer. Que je devais rester telle que j’étais. Si ma manière d’être te dérange alors il ne fallait pas devenir mon ami aussi vite et encore moins m’embrasser pour disparaître ensuite ! » Il avait raison, elle n’avait pas à faire piétiner comme ça. Et encore moins par lui qui était important dans son cœur. « Tu me manques. » Lâcha-t-elle finalement, sans prévenir. Un sourire triste. Un rire amer et honteux. La jeune fille posa sa main contre son front, émue malgré elle. « Tu me manques tellement… » Sa voix était brisée, cassée, à peine audible en avouant ses mots. « Mais si je suis quelqu’un de si insupportable selon toi alors t’as raison. Ignores-moi, je n’veux pas être ce genre de personne à tes yeux… Car crois-le ou non, j’ai tout de même un minimum d’amour-propre, comme tout le monde. » Et sans prévenir, elle sortit brusquement du placard comme une tempête, le laissant seul et enfin libéré du misérable être qu’elle était.

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